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Magie du Chaos

Chaos Magick

Par Ray Sherwin

La Chaos Magick plonge ses racines dans toutes les traditions occultes et dans l’œuvre de nombreux individus. Si quelqu’un doit être considéré comme l’instigateur, même involontaire, du climat actuel, c’est Austin Osman Spare, dont le système magique était entièrement basé sur sa propre image dans un modèle égocentrique de l’univers. Il n’avait pas l’intention que son système, créé pour son propre bénéfice, soit utilisé par d’autres puisqu’il était clair dans son esprit que deux individus ne pouvaient tirer bénéfice du même système. Il n’est pas non plus tombé dans le piège consistant à croire que l’information qui lui était révélée puisse être pertinente pour toute l’humanité comme tous les messies le firent par le passé. Aleister Crowley en vint à le considérer comme un « frère noir » simplement parce qu’il refusait d’accepter la Loi de Thelema, préférant travailler au-delà des dogmes et des règles, se basant sur l’intuition et des connaissances prenant racine dans les profondeurs du moi.

L’expression publique la plus récente de la Chaos Magick a consisté dans les œuvres des Illuminates of Thanateros, un ordre que Peter Carroll et moi-même avons fondé en 1978. Notre but, à cette époque, était d’inspirer plutôt que de guider les magiciens travaillant dans la Chaos en publiant des idées pratiques. Notre approche différait de celle de Spare seulement par notre intérêt pour le travail de groupe autant que pour la magick solitaire. La réaction à nos écrits fut plus importante que nous ne l’avions anticipé et vers 1982, il y eût des groupes travaillant en Angleterre, en Australie, en Égypte et en Allemagne, ainsi que des groupes associés tels le « Cercle de la Chaos » et bien d’autres individus oeuvrant isolément.

La difficulté à diriger un tel ordre se manifesta bientôt. Ce qui nous semblait simple, en tant que technique et concept, ne semblait pas si simple aux gens qui n’avaient pas eu à souffrir de l’étrange complexité et de l’arbitraire de ce qu’on appelle actuellement « magie traditionnelle ». Cela nous mit dans une situation assez étrange, car il nous semblait que des concepts magiques qui selon notre propre définition, ne pouvaient être enseignés devaient à présent l’être. Pete et moi-même considérions le statut de gourou et la hiérarchie comme des anathèmes et, cependant, nous fûmes obligés non seulement d’enseigner, mais aussi de diriger.

Il est parfois dit que tous les systèmes de la magie ont les mêmes résultats. Je doute que ceci soit vrai, car de nombreux systèmes ne font qu’enfermer leurs pratiquants dans des dogmes et des morales très étriqués (même lorsqu’il n’y a aucune prêtrise en tant que telle), tandis que l’instinct et l’imagination y sont bridés par des règles et des doctrines. Une voie ne peut être choisie raisonnablement qu’après que toutes ont été examinées et se restreindre soi-même à ne parcourir qu’une seule voie conduit, dans tous les cas, à une limitation des expériences et des modes de pensée.

Une solution fut peut-être trouvée pour enseigner ce qui ne peut pas l’être. Aucune règle ou aucune instruction n’a jamais été donnée, seulement des suggestions. Aucune mention ne fut faite de notions ressortant de convictions individuelles, telles que la réincarnation et l’existence ou la nature de dieu. Ces convictions n’ont d’ailleurs aucune influence sur la performance de la magie pratique et chaque praticien parvînt à ses propres conclusions. Nous sûmes que nous étions sur la bonne piste lorsque nous finîmes par collecter des informations envoyées par des groupes ou des individus. Sans exception, ceux qui nous envoyaient des résultats considéraient les techniques qu’ils avaient utilisées comme extrêmement efficaces, mais – et c’est un élément important – en tiraient tous des conclusions philosophiques différentes. Qu’ils soient arrivés à des conclusions divergentes et qu’ils continuent à vouloir travailler avec la structure que nous avions mise en place était plus encourageant que quoi que ce soit d’autre.

Détailler les méthodes de la Chaos Magick serait inutile puisqu’elles sont expliquées en détail dans diverses publications. Il serait plus utile de souligner les erreurs populaires propagées par les personnes écrivant dans les magazines spécialisés. Il y a eu une certaine confusion au sujet du mot « chaos », quelques écrivains croyant que ce terme était utilisé afin d’exprimer les techniques elles-mêmes. Rien ne peut être plus éloigné de la vérité. Il est vrai que certains types de gnose tirent leur efficacité de ce qu’ils neutralisent les fonctions ratiocinatives, mais ils mènent, en fin de compte, à la clarté, et les magiciens impliqués dans le courant de la Chaos tendent à être méticuleux dans la manière dont ils organisent leur programme de travail. Ceci est un leg du système « 93 ». Nous avons inventé le terme « Chaos Magick » afin de signifier le caractère hasardeux de l’univers tel que défini par les magiciens suivant pour leurs propres buts, et cette définition est sans cesse repensée et peut être régulièrement changée. La Chaos exprime cette philosophie et l’idée qu’il n’existe pas de modèle permanent pour les relations entre les individus et le reste du monde. Ce terme comprend non seulement les choses que nous savons être vraies, mais aussi ce que nous suspectons être vrai, le monde des impressions, de la paranoïa et des possibilités.

S’il existait quelque chose comme un Credo Magick, il se profilerait dans les lignes qui suivent :

− Je ne crois pas en tout.

− Je sais ce que je sais (gnose) et je postule des théories qui pourront entrer ou non dans mon système de croyances une fois qu’elles seront testées.

− Il n’y a ni dieux ni démons, sauf ceux que j’ai conditionnés et ceux que j’ai créés pour moi-même.

− Je crée et je détruis les croyances selon leur utilité.

− « Rien n’est vrai, tout est permis » – si cela n’interfère avec personne.

Au niveau d’un groupe, bien évidemment, une forme de consensus doit être atteinte. J’utilise le mot consensus à dessein, car d’autres expressions telles que « réalité partagée » seraient ambiguës puisqu’aucune notion au-delà du concret ne peut être partagée. Elle peut, au mieux, être appréciée. La direction dans la technique est toujours utile, mais la confiance dans les livres, et même dans les livres de chaos Magick, doit être minorée en faveur du travail effectué en suivant son instinct.

Le travail de groupe se répartit la plupart du temps en quatre catégories : l’expérimentation, l’initiation, le rituel et la célébration, bien que tous les groupes ne possèdent pas ces quatre catégories dans leur répertoire. Le plus important pour un groupe œuvrant à une magick quelconque est de construire et de maintenir une atmosphère qui excite et inspire l’imagination. Les groupes existant à l’heure actuelle se sont, plus ou moins éloignés de l’idée qui prévalait dans les années septante voulant que les artifices théâtraux ne sont pas nécessaires. Ils tendent à utiliser tous les moyens qui contribueront à l’atmosphère magique qu’ils désirent créer. Les armes magiques traditionnelles sont parfois utilisées, mais, le plus souvent, elles ne le sont pas. De nouvelles armes particulières à chaque groupe sont fabriquées. Les masques et des robes étant efficaces ils sont par conséquent largement utilisés bien que la nudité ne soit pas non plus ignorée (voir le « Rite Cardinal de la Chaos »).

La sigilisation a été un de ses sujets de recherche les plus fréquents de la magie expérimentale, mais la télékinésie et la télépathie, ainsi que d’autres méthodes furent expérimentées à divers degrés.

La Chaos Magick ne cherche pas à convertir, mais tous ceux qui sont attirés par l’aventure magique et qui y sont préparés sont bienvenus dans les groupes en activité.

Chaos Magick. Ray Sherwin. Traduction française par Spartakus FreeMann, octobre 2008 e.v. Le texte original de cet article peut être lu sur le site Templex.

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