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Lam, la tête au TOTO [2]

Par Melmothia

3. Lam dans l’œuvre de Kenneth Grant

« Une telle prolixité procédant d’une simple ébauche un peu bizarre constitue à coup sûr une étonnante leçon sur le fait qu’il ne faut jamais laisser traîner ses dessins moches ou, si on le fait, qu’il faut s’assurer qu’ils atterriront entre les mains de Kenneth Grant – qui, lui, trouvera bien quelque chose à en faire » – Hermann Skelder.

Revenons au principal artisan du mythe. Dans les années 50, Kenneth Grant regardait déjà vers les étoiles. C’est même la raison principale de sa mise à la porte de l’OTO. En 1955, il annonce dans un communiqué la découverte d’une planète transplutonienne appelée Isis et fonde la New-Isis Lodge, ce qui déplaît profondément à Karl Germer. Éjecté de l’OTO, Grant s’en va fonder le TOTO (Typhonian Ordo Templi Orientis) auquel le culte de Lam sera ultérieurement intégré.

A noter qu’ultérieurement n’est pas un faible mot : trente années se sont déjà écoulées entre la publication de The Equinox 3,1 et la mention par Kenneth Grant de la « nature extra-terrestre de Lam ». Il en faudra encore autant que pour que soit élaboré et théorisé un « culte de Lam » à proprement parler. Pourquoi autant de temps entre la première révélation (rappelons que Grant se serait écrié en 1945 que le portrait était celui d’un extra-terrestre) et ces développements ? Eh bien, l’histoire ne le dit pas. Toujours est-il qu’on trouve beaucoup plus de matériel sur Lam dans les ouvrages récents de Grant qui s’en justifiera en marmonnant que ça prend du temps ces choses-là, et que l’exploration est toujours en cours. Plus tard, il dira avoir reçu « un signe très fort » justifiant la mise en place du culte.

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Après trente ans d’absence, le dessin de Crowley réapparaît donc dans le premier ouvrage de Grant, The Magickal Revival, paru en 1972. Aucun commentaire n’accompagne l’illustration hormis cette légende : « Lam, une intelligence extra-terrestre avec laquelle Crowley fut en contact astral en 1919. Ce dessin de Crowley apparut dans une exposition à Greenwich Village, New York, la même année ».

Trois ans plus tard, dans Cults of the Shadow (1974), il est fait, de nouveau, allusion au portrait, mais sa signification reste encore flottante. Lam pourrait être, selon Grant : « un portrait d’Aiwass ou bien une représentation du Petit soi élémental symbolisé par le phallus ou encore la tête d’un spermatozoïde renvoyant à Hadit (la Volonté) dans le symbolisme thélémite ».

Dans le même ouvrage, est cité un extrait d’un courrier de Michael Bertiaux. Pour la première fois, d’autres personnes que Crowley et Grant sont concernées par l’entité Lam. Selon Grant, Bertiaux lui aurait écrit : « Sans aucun doute, cette entité [NDT : Lam] est la même que celle avec laquelle a travaillé Lucien-François Jean Maine… Lorsque ce dernier a organisé le travail de La Couleuvre Noire dans les années 20. C’est alors que la théorie des « Points Chauds » [NDT : en français dans le texte] a pris une tournure nettement tantrique et chamanique et que le terme « Les Siddhis » fut employé pour désigner une étape de développement de ces Points chauds telle que la lycanthropie, etc. Cet être, Lam, possède assurément un système magique intéressant et entend que nous l’utilisions. Et il est dans mon intention d’en donner un aperçu ». On notera qu’à aucun moment Bertiaux ne dit avoir lui-même travaillé avec Lam. Puis, en note de bas de page, est ajoutée cette précision : « Plus récemment, certains adeptes de l’OTO à New York, dirigé par Soror Tanith, ont contacté cette entité ».

Des informations sur lesquelles Grant revient dans Nightside of Eden, en 1977. Cette fois, Bertiaux devient un adepte de l’entité à tête d’oeuf. Après avoir traité du symbolisme de la « tour du silence » dans différents systèmes, Grant enchaîne : « Un autre groupe d’adeptes résidant à New York, dirigé par Soror Tanith de l’OTO, a également reçu des symboles identiques dont les principaux sont la Tour du Silence et l’abeille de Sekhet. La transmission à Soror Tanith a été effectuée par une entité extra-terrestre connue sous le nom de LAM qui avait été précédemment contactée par Crowley en 1919. Le dirigeant du Culte du serpent noir, Michael Bertiaux, a également été contacté par Lam, lors de son travail dans le courant tibétain Bon-Pa, dans les années soixante. Dans toutes ces invocations et travaux magiques, le symbolisme évoqué ci-dessus a été dominant, ce qui suggère qu’en trois lieux (à savoir l’Ohio, New York et Chicago) se trouve une énergie occulte identique, entité ou courant, dont les vibrations rayonnent en harmonie avec les symboles de Mu ou Maât, c’est-à-dire de l’éon à venir ».

Par la suite, cette idée que Bertiaux (et d’autres) aurait contacté Lam au cours de rituels dans les années 60, c’est-à-dire bien avant que Grant ait lié ces deux éléments dans ses propres écrits, se retrouvera chez la grande majorité des commentateurs. Si l’on en croit les informations que l’on trouve sur le Web, Bertiaux aurait réédité l’œuvre d’Amalantrah et conclu que Lam était « une manifestation souterraine de la Gnose Luciférienne ». J’ai cependant échoué à trouver la source de ces informations. Or, dans les années 60, si l’on en croit sa biographie, Bertiaux était plutôt occupé à égorger des poulets en Haïti avant de fonder à Chicago son Église gnostique néo-pythagoricienne, mélange de vaudou et de martinisme. Aurait-il libéré un week-end pour contacter les galaxies lointaines… ? Toute personne qui pourra me renseigner sur le sujet est la bienvenue.

Enfin, dans le glossaire, Grant enfonce une nouvelle fois le clou en définissant Lam comme : « Une entité extra-terrestre avec laquelle Crowley est entré en contact vers 1919 et qui, par ailleurs, ces dernières années a été contacté par Soror Tanith de l’OTO, et par Michael Bertiaux du Culte du serpent noir. Une reproduction du portrait de Lam de Crowley se trouve dans The Magical Revival ».

Image extraite de Outside The Circles of Time, sous-titrée : Portrait de Lam par Aleister Crowley (autel avec statuettes et sceaux des Grands Anciens, ainsi que la dague magique utilisée par Crowley dans son invocation de Choronzon en 1909)

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Nous arrivons à présent dans les années 80, époque où l’entité Lam gagne en consistance. Outside The circles of Time (1980) est le premier ouvrage dans lequel Grant en développe abondamment la mythologie. Il continuera de le faire dans Hecate’s Fountain (1992), Outer Gateways (1994) et The Ninth Arch (2002). C’est également l’époque où, grâce à sa logique très personnelle, les choses se compliquent nettement, ou, pour le dire autrement, le melting pot de guématrie sauvage, rapprochements pittoresques et métaphores échevelées confine au festival. Il devient dès lors acrobatique de suivre les tribulations de Lam.

Ainsi, Le texte ‘channelé’ Wisdom of S’lba présenté dans Outer Gateways comporte une brève allusion à Lam en 140.39 : « Ceci est le premier et dernier tourbillon avant l’arrivée de l’œuf-Lam ». Ne me demandez pas ce que ça veut dire, toujours est-il que Grant développe cette association dans le chapitre suivant, « The mystical Gnosis of S’lba », en expliquant que le nombre de S’lba, si on prend la peine de l’écrire avec un samekh, est 93, qui est aussi le nombre d’UWAISI (Aiwass) un terme arabe signifiant « initiation ». C’est également le nombre de KANAKA, un dieu polynésien impliquant dans son culte des rites sexuels donnant naissance à des mutants semblables aux « profonds » lovecraftiens… qui finiront d’ailleurs par retourner à l’océan pour rejoindre le grand Cthulhu dans les abysses. Le nombre 93 est enfin celui de MGN, Magonia, la source des Maskim qui, selon le Necronomicon, « attendent aux limites du monde ». Les Maskim qui sont les Qliphoth des zones de pouvoir planétaires, sont reliés au Lama de Lêng (LAM) par le nombre 171 qui renvoie à l’invocation d’entités extraterrestres par le biais de rituels de magie sexuelle.

À défaut de pouvoir prétendre à l’exhaustivité ou à embrasser les subtilités de la pensée grantienne, nous allons donc devoir nous contenter de quelques éléments saillants :

Le rapprochement entre le portrait de Lam et l’œuvre d’Amalantrah étant depuis longtemps acquis pour Grant, il ne s’agit plus que d’en filer la symbolique. Nous savons donc que Lam est un œuf et qu’il est également « la voie » conformément à la glose de Crowley, ainsi que le dieu égyptien du silence Harpocratès. Lam se confond également peu un prou avec Aiwass dont l’auteur nous précise qu’il est lui-même une entité « extra-terrestre » : « La tête sans oreille et en forme d’œuf de Lam est l’un des masques d’Aiwass, le ministre, l’archange, ou le dieu du silence, Hoor-paar-Kraat » (extrait de Outer Gateways). Vers le milieu de l’ouvrage, Lam, tout en restant un « petit gris », sera présenté comme un dropa, une race extra-terrestre apparue dans la culture ufologique en 1962 suite à la supposée découverte de disques de pierre gravés dans une grotte à la frontière de la Chine et du Tibet. Dans The Ninth Arch, Lam deviendra « le chef des dropas ».

Assiette de Loddaloff

L’une des sources de Grant sur le sujet semble être l’ouvrage de Robert Charroux, Le livre des maîtres du monde, paru en 1967, mélange d’ufologie, de théorie du complot, mêlant tous les vieux mythes de l’hyperborée, à Mu et l’Atlantide. C’est peut-être à cette eau que Grant puise le rapprochement entre Lam et la mythique Lémurie. Dans un chapitre intitulé « The Mahdyamaka & Crowley » de l’ouvrage Outer Gateways, nous apprenons en effet que Lam peut être rapproché du terme sanskrit, de même valeur, Anatta qui lui-même renvoie à Anatma. Anatma sera ensuite rapproché de Lamal, de valeur 102, qui selon Grant est un « palindrome exprimant le véritable culte de Lam en tant que transmetteur de AL ou LA (son négatif) par le biais de MA ». L’auteur ajoute que « 102 est la valeur de Nu + Mu (56 + 46). Mu est un synonyme de Lémurie » et qu’il « est significatif que la montagne d’Arunachala dans le sud de l’Inde date de l’époque lémurienne ». D’ailleurs, « la forme védique d’Anatta, c’est-à-dire Anatma, vaut 493, la valeur de Zos Manas Zi Ba signifiant : ‘Rien se manifeste dans n’importe quelle forme’. Son autre valeur, 253, est celle de Al Hazred, le nom de l’arabe fou qui a transmis la gnose du Nécronomicon ».

De là, Lam glissera facilement vers les Grands Anciens : « Le nombre de la Nuit, 466, est aussi le nombre de Hast, « la déesse qui garde la porte du ciel, la nuit » et de GLGLTh, « le crâne », symbole de la mort et du mystère de la traversée de l’existence à la non-existence. 180, l’un des nombres de Nox ou Nuit est un nombre de silence, et il y a une connexion avec Lam et l’Éon silencieux. Un autre nombre de Nuit est 116 (Nun=50, Vau=6, Samekh=60), MBOD signifiant à l’extérieur et, de Satalie, le vortex. 116 renvoie aussi à Kilena, l’Arbre de la Crucifixion, dans le culte Dogon et à une forme de de Golgotha (GLGLTh). 116 est 1 (aleph, le chemin de l’air) de moins que Lam 71 + Mu 46 et, selon le Nécronomicon, Lammu est le nom du premier jumeau né des Grands Anciens. Lam concentre la jumellité ou double courant [NDA : le double courant ophidien est représenté dans la gnose stellaire par Gemini, les Jumeaux et la lettre Zain, l’épée] et Mu représente les Profonds Lovecraftiens ou Ceux de l’Extérieur ». Dans les pages suivantes, Lam devient le « Grand Lama » du culte de Zain. Puis celui du plateau de Lêng, tel que mis en scène dans les histoires de Lovecraft, à propos duquel Grant écrira notamment dans The Ninth Arch « Lam et Leng sont étymologiquement identiques dans les langues asiatiques. »

Lam, par ailleurs, serait le mot secret du Liber AL. Après avoir filé la parenté entre la racine Lam et les termes Lamala et Talam, dans Outside the Circles of Time, Grant écrit : « Selon AL.lII.2. : « Il y a un mot inconnu ». Ce mot que nous supposons être Lam, est, comme nous l’avons déjà mentionné, le lien entre les Éons d’Horus et de Maât par l’intermédiaire des galaxies Sirius et Andromède ».

J’ai échoué à trouver à quel endroit Grant commençait à rapprocher l’entité Lam de cet Éon de Maât, mais à partir d’Outside the circles of time, c’est chose faite : « Il est probable que le livre mystérieux de Blavatsky se réfère à l’Éon sans paroles, et il est certainement significatif que Crowley, lorsqu’il publie son commentaire sur la Voix du Silence, place en frontispice son portrait de Lam, Vie extra-terrestre et Intelligence suprahumaine, des traits particulièrement pertinents pour l’Éon de Maât ». Plus loin, Grant affirme que « la présence de l’œuf prépare la manifestation de l’Éon de la Fille, l’éon de Maât ».

Plus loin encore : « Lorsque Aiwass (418) est ajouté à Lam (71), le résultat numérique est 489 ; ce nombre a ajouté au Shin, la lettre du trident symbolique de Chozzar, donne 789, qui est le nombre de la prêtresse qui a été contactée par Lam à New York en 1974. Le nombre 300 (Aossic) lorsqu’il est ajouté à 418 (Aiwass), donne 718, qui est un nombre clé du Liber AL. Ainsi : Lam-Aiwass = 489 ; 489 + Set = 789 ; Ipsos + Aïwaz = 789 ; Aossic-Aiwass = 718. Nous avons déjà été noté que le nombre d’Ipsos (696) ajouté à 93 (Aïwaz), donne également 789.

Set ou Had est le cœur d’Abrahadabra, qui est la formule du Grand Œuvre de l’Éon d’Horus. Il est également le cœur de Andahadna, la formule et le nom de la prêtresse de Maât qui ont reçu la Révélation de l’Éon de Maât, qui, lorsque vibré au moyen du Courant 93 actuel, produit 789. Ainsi, les deux éons sont irrévocablement entrelacés ».

Puis dans Outer Gateways, Grant écrit : « Lam est le haut Lama du culte de Zaïn, qui combine l’Ain (Ayin), l’œil de l’Espace et l’aile de l’œil volant d’Horus avec le Z du pouvoir du Serpent. Le nombre des dropas est 655 qui est également le nombre de Merti, les yeux de Maât ».

Cette association entre Lam et l’Éon de Maât sera de nouveau filée dans les ouvrages suivants, jusqu’à The Ninth Arch ou Grant écrit, en référant à l’œuvre d’Amalantrah : « ‘Tout est dans l’œuf !’ (cad dans Lam). Et quel est ce ‘tout’ dans Lam ? L’éon de Maât ! ».

Quant au « double courant » évoqué plus haut, c’est bien entendu le courant Typhonien. Dans Outer Gateways, Lam aura même droit à son propre Tunnel de Set, en l’occurrence le 17ème : « Quiconque a déjà lu attentivement des récits de rencontres avec des extra-terrestres a pu noter la grande fréquence des visions impliquant la couleur orange – le mélange de rouge et de jaune. Dans la symbolique Kala de l’occultisme, l’orange est associé au Tunnel 17, celui du double courant. Son éon magique, ou ange, est Zaïn symbolisé par l’épée ou le cimeterre. Les ovnis sont fréquemment décrits comme des formes ascendantes, lorsqu’ils ne le sont pas comme des œufs ou des ellipses. L’épée et l’œuf jouent un rôle dominant dans l’œuvre d’Amalantrah-Abuldiz de Crowley. Ce constat, et la présence de la couleur, ou Kala, associée à Zaïn et à l’Eon « sans parole », suggère le silence généralement associé aux apparitions d’ovnis ainsi que l’absence d’oreilles souvent notée par les contactés lors de leurs descriptions des extra-terrestres. ». Plus loin : « Lam est 71. Le reflet de 17 et le numéro tarotique de Zaïn, le chemin associé aux Jumeaux typiques du Double Courant, ainsi qu’avec l’épée qui est la signification du mot ‘Cherub’. […] Les Kalas associées au chemin de Zaïn sont de couleur orange (selon l’échelle du Roi) et mauve (selon l’échelle de la Reine) ».

Sceau de Zamradiel, 17eme Tunnel de Set, Nightside of Eden.

Nous retrouvons donc les extra-terrestres, cette fois associés à Zaïn, à l’épée, au Tunnel 17, à la couleur orange, au silence et enfin, à l’œuf. La boucle est presque bouclée.

Mais le festival continue. Dans The Ninth Arch, l’entité Lam occupera une place de choix dans le texte ‘channelé’ Le Livre de l’Araignée (« The Book of the Spider », ou « OKBISh »), transitant du porche de l’église de Rennes le Château (!) sous sa forme « Lama de l’abominable plateau de Lêng », à « l’oiseau Qrixkuor », à « Mâ-atu, la maison de Lam », en passant par le « Feu de la Terre et de Lam », pour être finalement identifié à OKBI, l’araignée elle-même. Plus loin, on peut lire : « il n’est pas anodin que 103 = Naacal, le langage primitif des prêtres de l’Himalaya, la langue de Lêng, la région dans laquelle Lam et les dropas ont atterri lorsqu’ils sont descendus sur terre et à partir de laquelle ils se sont répandus pour infiltrer l’atmosphère éthérique terrestre ».

Dans le glossaire du même ouvrage, qui constitue la production la plus récente de Grant, Lam est défini comme suit : « Lam : Littéralement ‘la voie’, ‘le chemin’, ‘le tunnel’, ‘le passage’. Lam est aussi le nom d’une entité extra-terrestre qui a dirigé la seconde invasion de la terre depuis Sirius il y a environ 12.000 ans. Lam et les autres atterrirent sur le plateau de Lêng, au sud-est de la Chine, à la frontière du Tibet, mais furent exterminés par les terriens. Avec quelques survivants, Lam se rendit dans la Terre du Dragon (Bhoutan) où ils établirent leur culte en sécurité dans la montagne. Leurs descendants sont connus des bouddhistes sous l’appellation de Dropas ou Dzopas (variantes : Drukpas, Drugpas), ceux qui suivent la voie (lam) du dragon. Certains disent qu’ils viennent de l’étoile Gamma Draconis. Crowley a rencontré Lam durant un travail magique aux États-Unis en 1918 lorsqu’il interrompit une séance avec Amanlantrah pour converser avec l’entité. Il s’agit probablement de la première représentation d’après nature d’une intelligence suprahumaine ».

Pour finir, l’entité sera de plus en plus souvent présentée au sein de l’OTO Typhonien comme un HGA (Ange Gardien) ou un égrégore capable de manifester l’Higher Self du magicien, puis, comme nous le verrons dans la dernière partie de cet article, Michael Staley rebondira sur le bija Lam, traditionnellement associé au chakra Mulhadhara, pour ajouter une queue de serpent à la tête d’œuf du portrait de Crowley et en faire une représentation de la Kundalini.

4. Sens dessus dessous

Si vous vous sentez un peu perdus, ne vous inquiétez pas, c’est normal. Dans ses premiers ouvrages, de 1972 aux années 80, Grant explore sur le mode -rabout de ficelle l’univers des symboles occultes, ne reculant devant aucun amalgame pour nourrir son système. Ses écrits sont donc constitués d’enfilades de guématries fantaisistes, réinventions de l’histoire et macédoine de toutes les traditions qui lui tombent sous la plume. Yog Sotthoth y flirte avec Aiwass, les Illuminati dansent avec Horus, recrutant en chemin quelques dieux africains, Austin Spare, des Sephiroth et Kali qui passaient par là. Après 1980… les choses empirent. Il devient désormais impossible de démêler l’écheveau, malgré certaines constantes comme celles que nous avons relevées plus haut et qui tendent à laisser penser que Grant, au moins, sait où il veut aller, ce qui est déjà pas mal.

En résumé : soit Kenneth Grant écrit absolument n’importe quoi / soit Kenneth Grant écrit n’importe quoi et s’en fout puisque ses cocktails lui permettent de construire son propre système original et fonctionnel / soit Grant écrit n’importe quoi, mais à l’instar de ce qu’il pense de Lovecraft, son intuition confine au génie irrationnel. N’étant pas dans les secrets de Dieu (ni de Maât), je ne saurais me prononcer sur la valeur absolue de la pensée de Kenneth Grant, devant me contenter d’esquisser de grandes lignes thématiques et quelques hypothèses.

En voilà une d’ailleurs : une telle frénésie, outre le romantisme pour ainsi dire fortéen qu’elle confère à l’œuvre, mérite qu’on y regarde de près. Car les délires de Grant ont cela de subjuguant, qu’ils font voler en éclat les catégories de la pensée. Une démarche qui, à l’instar du dérèglement des sens rimbaldien, a peut-être séduit ses lecteurs les plus avisés, davantage que sa logorrhée symbolique. Vient un point dans la mythologie de Lam, un point de grande confusion, où les entités surnaturelles, les extra-terrestres, les êtres de fictions, etc. sont présentés comme une grosse boule de chewing-gum participant de la même « altérité ». Il est par exemple frappant de constater que le cloisonnement implicite que nous adoptons entre le Ciel où badinent les anges et les cieux très astronomiques où volent les soucoupes, n’a plus court.

Ainsi que l’écrit Michael Staley dans la préface de la Déclaration de Lam : « L’idée d’entités extra-terrestres semble causer des difficultés à certaines personnes, qui l’associent aux paysages sauvages de la science-fiction. Il y a cependant suffisamment de données sur cette question pour corroborer le vieux cliché voulant que la vérité dépasse en étrangeté la fiction […] Que ces visiteurs soient considérés comme venant d’un espace extra-atmosphérique, ou comme jaillissant des profondeurs d’un espace intérieur, ne renvoie ni à ici ni à là-bas. La dichotomie « intérieur » « extérieur » est purement conceptuelle, partant du principe dualiste que l’individu est en quelque sorte séparé du reste de l’univers, qui serait « là-bas ». Or, il n’existe rien, en réalité, en dehors de la conscience, qui est un continuum ».

Il est connu que pour pénétrer la surnature, il convient de chambouler le réel, tâche dans laquelle Grant, pour le moins, excelle. Peut-être serait-il donc intéressant de considérer que cette destruction et réécriture échevelées du réel participent de cette dynamique voulant qu’un autre point de vue soit toujours nécessaire à la pratique magique.

5. Le Culte de Lam

Image extraite du site Wisdom Quaterly.

À partir de 1987, Grant entreprend de mettre en forme le culte de Lam ; une sous loge de l’OTO Typhonien y sera même entièrement consacrée. Dans le même temps, un manuscrit intitulé « La Déclaration de Lam » est diffusé auprès des membres dans le but « d’établir le mode de relation et d’élaborer une formule magique pour établir la communication avec Lam ».

On peut notamment y lire : « Le culte de Lam a été fondé parce qu’un signe très fort a été envoyé par Aossic Aiwass à 718 (NDT : Kenneth Grant) pour spécifier que le Portrait de Lam (le dessin original ayant été donné par 666 à 718 dans des circonstances étranges) était le support d’une énergie extra-terrestre – et peut-être transplutonique […] Notre objectif est non seulement d’obtenir des informations sur la nature de Lam, mais également sur la possibilité d’utiliser l’œuf comme une capsule sidérale pour voyager dans le domaine de Lam, ou pour explorer des espaces extra-terrestres, de la façon dont les voyageurs du temps tantriques de l’OTO explorent les tunnels de Set dans des capsules intra-cosmiques et telluriques » – Publié dans Starfire volume I numéro 3 (Londres, 1989).

Ce que les Typhoniens résument comme suit :

– Lam est un lien entre les galaxies de Sirius et d’Andromède.

– Lam est la porte du vide. Son numéro, 71, est celui de « Rien », un mirage.

– Lam est un Grand Ancien dont l’archétype se retrouve dans les comptes-rendus des témoins d’apparitions d’OVNI.

– Lam a été invoqué pour remplir les tâches entreprises par Aiwass ; en tant que reflet d’Aiwass.

– Lam est un transmetteur vers AL des vibrations de LA par MA, la clé de l’Éon de Maât.

– Lam est une énergie occulte émanant les vibrations de Maât et procédant de cet Éon à venir.

(À suivre)

Lam, la tête au TOTO, Rédaction & traductions par Melmothia, 2010.

Rendition of Lam, par Yuri Leitch.

Extrait du blog Avalonian Aeon Publications.

Sources :

« ‘Laughing Stock’ danger of worshipping strange entities », Hermann Skelder. In Kaos 14, Joel Birocco, 2002, pp. 35-38.

« Aleister Crowley’s Lam & the Little Grey Men, A Striking Resemblance », par Daniel V. Boudillion, 2003.

« Yabba Dabble Doo: How Aleister Crowley Introduced the Iconic Gray Alien », Richelle Hawks, sur le site UfoDigest.

« The LAM hypothesis », Graylien, 2007, sur le site Cabinet of Wonders.

« Plan 93 from Outer Space », P.R. Koenig.

« Did Magicians Cause UFO Sightings ? », 2005, sur le site Biblioteca Pleyades.

« Lam : Some Notes on an Extra-Terrestrial Entity », Phil Hine.

« Chinese Whispers: The Origin of Lam », Alan, sur le site Baptist’s Head.

« Kenneth Grant: Pseudo-Initiate », Alan, sur le site Baptist’s Head.

« The LAM Workshop : A Dialogue », The Baptists, sur le site Baptist’s Head.

Adaptation par Air Zombie de « LAMeditation ».

« LAM : Aleister Crowley : Magick : Sex & Extra-Terrestrial Contact », sur le site dCodeReport.

« LAM : The Gateway », Michael Staley, sur le site The Ordo Templi Orientis Phenomenon.

« The Lam-Serpent Sadhana », Michael Staley, sur le site The Ordo Templi Orientis Phenomenon.

« The Mysteries of Lam », Michael Staley 1994, sur le site The Ordo Templi Orientis Phenomenon.

« Iridescent Undulations and The Sacred Fire : The Lam-Serpent Sadhana at Group Level », Michael Staley, sur le site The Ordo Templi Orientis Phenomenon.

« The Dikpala of the Way of Silence – The Lam Statement », Kenneth Grant, sur le site The Ordo Templi Orientis Phenomenon.

« Aleister Crowley and the LAM Statement », Ian Blake, 1996. Sur le site The Excluded Middle.

« Ritual Magic, Mind Control and the UFO Phenomenon », Adam Gorightly, sur le site Illuminati Conspiracy Archive.

« The Mystery of Lam », Frater Zephyros, sur le site Astronargon.

Kenneth Grant :

The Magickal Revival (1972).

Aleister Crowley and the Hidden God (1973)

Outside the Circles of Time (1980)

Outer Gateways (1994)

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