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Esotérisme, politique et philosophie

Directives pour la Liberté

Et pour ceux qui se sont fraîchement libérés

Ainsi donc, tu t’es échappé et tu es plutôt content de toi. Il y a de quoi, contempler les barreaux de la prison de fer noir, ce n’est pas terrible, mais à présent que faire ? La perspicacité que tu as acquise est cruciale, mais également potentiellement mortelle pour toi-même. Souviens-toi du vieil axiome – une petite connaissance est une chose dangereuse. Bienvenue à son grand frère – une grande connaissance est encore plus dangereuse. Déjà, simplement par ce que tu sais, tu es devenu un criminel de la pensée. Ils te cherchent et, si tu n’es pas assez prudent, ils te trouveront. Ensuite, ils te neutraliseront. La bonne nouvelle c’est qu’ils ne savent pas encore qui tu es. Ce guide contient 3 règles d’or qui peuvent t’aider à rester hors de leur portée. Bonne chance et fais gaffe à toi.

1) Garder la tête basse.

L’évangélisme semble bien sur le papier, mais je me tiens à l’écart, car c’est la plus sûre voie vers la chambre à gaz. L’un des plus célèbres évangélistes de l’histoire occidentale était un mec appelé Yeshua ben Yoseph mieux connu sous le nom de Jésus-Christ. Voilà un type qui a gravi une montagne pour y prêcher et vois où cela l’a mené – cloué sur une planche de bois pour y pourrir. Les choses qu’il a dites ont été réécrites, franchisées et reconditionnées par une ébauche de « Gouvernement S.A. » et utilisées afin d’alimenter de nombreuses guerres, invasions et oppressions ; le tout au nom de Jésus, au nom de Kathoolisme & Cie et de ses filiales.

Ce dont tu dois te souvenir c’est que si le mouton broutant son herbe peut te voir, alors les mauvais types le peuvent aussi. Si tu as découvert un trou de souris pour t’évader, alors tu le leur as également dévoilé et tu peux miser ton cul là-dessus qu’ils s’emploieront à le sceller, tandis que tu seras en train de te décomposer, fertilisant ainsi l’herbe dont sont nourris les moutons.

Plus tu deviens visible et plus tu attireras l’attention : brûle les t-shirts du Che et achète un truc avec Hugo Boss écrit dessus. Arrache le poster bouddhiste et jette tes autocollants de campagne antinucléaire. Garde tes livres sous ton lit. Si tu désires réellement accomplir quelque chose, le mieux que tu puisses faire c’est de travailler sous couverture. Se mettre sur une boîte de savon pour répandre la bonne parole n’est pas le meilleur moyen de diffuser le message ; par contre, c’est le meilleur moyen pour finir en prison. Ne souscris à aucun magazine subversif. Ne te montre pas aux performances et aux festivals ; ceux qui y vont sont tous fichés et, pire, ils n’arrivent à peu près à rien. Ne commets pas d’erreur ; maintenant que tu t’es débarrassé de tes chaînes, ils te cherchent. Ne leur rends pas la tâche plus facile.

2) Parler de la pluie et du bon temps.

Si tu es l’un d’entre eux, ils t’écouteront, mais uniquement si tu dis ce qu’ils veulent entendre. Pour en arriver là où tu es à présent, tu as dû probablement nager à contre-courant ; fier de te tenir à l’écart du troupeau et de cracher sur leurs habitudes et conventions.

Flash info : aucun d’entre eux ne t’aime ! Tu n’es qu’un zarbi de plus hurlant « brûlez votre MTV ». Un autre taré avec son panneau d’homme-sandwich : « La Fin du Monde est pour ce Soir ». On les a conditionnés à ignorer la subversion. La pérennité de leur esclavage en dépend. Fonds-toi dans le décor. Si un pamphlet BIP est retrouvé sur la photocopieuse, on accusera d’abord le mec aux dreadlocks avec ses piercings avant de penser à ce gentil type au costard YSL et pompes de luxe.

Penses-y : n’as-tu pas appris que le goth ou le guerrier écolo n’était qu’un individualisme préfabriqué de plus, vendu aux hors-caste pour satisfaire leur besoin d’affirmer leur différence ? Les slogans de mode sont de la merde, tu devrais le savoir. Alors coupe tes putains de cheveux et vire ces pompes de looser. Tu as plus de chance de les approcher et de leur secouer les méninges, et plus important : de t’enfuir, si tu as l’air Normal™.

3) Garder les yeux ouverts.

Désormais tu possèdes un nouveau niveau de conscience et un nouveau groupe de potes. Tes nouveaux potes ne sont pas faciles à reconnaître parce qu’ils ne portent pas tous les mêmes fringues que ton ancien groupe et ils ne professent pas non plus tous les mêmes merdasses idéalistes. Tes nouveaux amis ont appris les règles 1 et 2 et se sont fondus dans la masse. Alors écoute les « gens ordinaires » un peu plus attentivement.

Bien sûr la majorité reste ces mêmes tarés que tu haïssais auparavant, mais l’un ou l’autre peut très bien baiser le système depuis des années. Ils se méfieront de toi autant que tu te méfieras d’eux, mais tu devrais être capable de discerner de petites différences dans le comportement, du sang froid dans les situations de stress.

Une attitude cool qui cache un cœur d’acier. Dresse les antennes ! Abandonne un flyer discordien dans ton collège, sur ton lieu de travail ou dans la salle d’attente de ton médecin et observe les réactions. Le type qui y jette un œil, fait la grimace et le remet à sa place, voilà celui avec qui tu devrais engager la conversation. Mais ne commets pas d’erreur : être libre c’est vivre seul. Il faudra t’y habituer. Les gens « réels » sont peu nombreux et très éloignés les uns des autres.

***

Souviens-toi du moine Sanfroc

Qui a grimpé sur la montagne et

A découvert

Qu’il n’était qu’un trou-du-cul

Sur une montagne

Directives pour la Liberté. Titre original : « Rough Guide to Freedom (for the recently self liberated) », Black Iron Prison, traduction française Spartakus FreeMann, mars 2010 ev.

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